Search & Find
Accueil
OpenLAB   >   Accueil   >   Les TP   >   Protéines et Génétique 2012-2019   >   Pour préparer le TP   >   Parlons génétique

Parlons génétique


Positionnez le curseur de la souris sur les mots soulignés et attendez quelques instants pour voir apparaître une définition succincte ou cliquez pour accéder au glossaire complet.


Au commencement, l'ADN...

Avant de parler de génétique, il faudrait parler d’ADN, car c’est là que tout commence.  

L’ADN est une immense molécule, comme un long filament sur lequel se succèdent, chez l’Homme, 3 milliards de désoxyribonucléotides. Vous les connaissez sous le nom d’adénine, thymine, cytosine et guanine, symbolisés par les lettres A, T, C et G.  

Au sein d’une cellule, nous avons environ deux mètres d’ADN. Autant dire qu’il faut un travail titanesque pour réussir à faire entrer tout ça dans le noyau d’une cellule eucaryote ou dans le cytoplasme d’une cellule procaryote, qui est 200.000 fois plus petit… L’ADN est donc compacté, grâce à diverses protéines, dont certaines qu’on appelle des histones. 

Selon le stade dans lequel se trouve la cellule, l’ADN peut se présenter sous différentes formes. Soit sous forme d’un sac de nœud, complètement anarchique, remplissant tout le noyau de la cellule. Ou alors, sous la forme plus organisée et compacte que sont les chromosomes que l’on observe uniquement durant la phase M du cycle cellulaire, la phase de mitose. Au sein d’une même espèce, tous les individus possèdent le même nombre de chromosomes dans leurs cellules. Chez l’Homme, c’est 46 chromosomes, répartis en 23 paires.

Rôle de l'ADN

Il ne faut pas non plus oublier que l’ADN peut se retrouver dans d’autres entités cellulaires : les mitochondries et les chloroplastes (ces derniers sont présents uniquement dans les organismes photosynthétiques) qui fournissent de l’énergie aux cellules. Ces organites, qui correspondraient à d’anciennes bactéries intégrées dans une cellule eucaryote primitive il y a un à deux milliards d’années, possèdent encore de l’ADN, vestige des bactéries endosymbiotiques originelles bien que très marqué par l’évolution depuis le processus d’intégration.  

L’ADN est le support de l’information génétique. Il est identique dans toutes les cellules de notre corps. Il contient des gènes, chaque gène contenant l’information nécessaire à la production d’au moins une protéine qui aura une fonction bien précise dans la cellule. 

Attention, les gènes ne codent pas que pour des protéines, beaucoup d’entre eux permettent aussi l’expression d’ARN non-codants comme les ARN ribosomiques (ARNr), les ARN de transfert (ARNt) ou les petits ARN régulateurs.

Comparaison du noyau d'une cellule avec un livre

Comment les caractères génétiques sont-ils transmis ?

Comme nous l’avons dit, chez l’Homme, le noyau de chaque cellule comporte 46 chromosomes répartis en 23 paires. Ce n’est en réalité pas le cas de toutes les cellules : les cellules germinales ne possèdent que 23 chromosomes, un de chaque paire. 

Les cellules germinales sont également connues sous le nom de gamètes. Il s’agit en fait des ovocytes et des spermatozoïdes. Suite à une fécondation d’un ovocyte par un spermatozoïde, le matériel génétique se mélange, 23 chromosomes sont apportés par la mère et 23 sont apportés par le père. Le jeu de 46 chromosomes est ainsi recrée et l’enfant aura donc hérité des caractères de chacun de ses parents.

Caryotype humain

Le caryotype est la photographie de l’ensemble des chromosomes d’une cellule, triés par paires et rangés dans l’ordre de leur taille. C’est ainsi que des numéros peuvent leur être attribués, du plus grand au plus petit. Chez l’Homme, les paires de chromosomes sont donc numérotées de 1 à 22 (on parle de chromosomes autosomes), la dernière paire étant les chromosomes sexuels (X dans l’ovocyte, X ou Y dans le spermatozoïde). C’est ainsi qu’on peut caractériser génétiquement un mâle d’une femelle : la femelle aura toujours une paire sexuelle XX, tandis que le mâle aura une paire XY.

Un allèle, deux allèles…

Puisque chaque chromosome est représenté deux fois dans une cellule, nous disposons de toute l’information génétique en double : chaque gène est présent deux fois dans un même noyau, sur les deux chromosomes parentaux homologues. On appelle ces deux copies d’un même gène des allèles, dérivé du mot grec « allelos » qui signifie « l’un, l’autre ». 

Les deux allèles d’un gène peuvent toutefois ne pas être identiques et présenter de légères variations dans leur séquence nucléotidique. Ces variations peuvent être dues à des mutations, c’est-à-dire des changements d’un ou plusieurs nucléotides, induits suite à une erreur de réplication au cours des générations, ou encore suite à l’action d’un produit chimique ou d’une radiation ionisante. Prenons l’exemple du groupe sanguin. Ce caractère est exprimé par un gène situé sur le chromosome 9, codant pour une protéine qui se situe à la surface de nos globules rouges. Trois allèles différents existent pour ce gène : l’allèle A codant la protéine A, l’allèle B codant la protéine B, et un allèle O, ne codant aucune protéine fonctionnelle. 

Si vous portez sur vos deux chromosomes 9 les allèles A et O, vous serez de type sanguin A. Ceci est dû au fait que l’allèle A est dominant et l’allèle O est récessif. De même, l’allèle B est dominant par rapport à l’allèle O. Pour qu’une personne soit du groupe O, il faut donc qu’elle possède deux allèles O sur ses deux chromosomes 9, l’un provenant de son père, l’autre de sa mère. Et une personne portant un allèle A et un allèle B sera de type sanguin AB : A et B sont co-dominants. 

Souvent cependant, les caractères génétiques ne sont pas définis par un seul gène, mais par l’action combinée de plusieurs gènes… Très peu de caractères sont en fait définis par un seul gène. Un rare cas à citer serait la présence de tâches de rousseur.

Pourquoi certaines allèles sont dominants et d’autres récessifs ?

Un gène code pour une protéine, ayant une fonction bien précise. Le plus souvent, l’allèle dominant d’un gène va coder pour une protéine fonctionnelle. Au contraire, un allèle récessif aura bien souvent subit une mutation, un changement dans sa séquence en nucléotides, de telle manière qu’il codera pour une protéine anormale, non fonctionnelle, ne remplissant pas son rôle. 

La cellule exprime les deux allèles du gène et produit les deux protéines, mais seule la protéine dite sauvage, celle dont le gène est normal, non muté, remplira sa fonction. L’autre protéine sera dégradée par la cellule. Dans le cas d’une maladie génétique, la personne portant ce genre de mutation est appelé un porteur sain. Il n’est en effet pas malade mais peut transmettre l’allèle muté à sa descendance. 

Dans le cas où un individu porterait deux allèles récessifs d’un même gène, aucune protéine 100% fonctionnelle ne serait exprimée. Dans ce cas, les conséquences peuvent être plus ou moins graves selon l’importance de la protéine et la nature de la mutation (allèle). Il peut s’agir d’un simple caractère physique (par exemple, la présence de tâches de rousseur chez une personne portant deux allèles récessifs du gène muté de la protéine MC1R), à des maladies plus ou moins importantes comme le daltonisme, le syndrome de Bardet-Biedl, la drépanocytose ou la mucoviscidose. On parle de maladie autosomale récessive. 

Cependant, il arrive parfois qu’un allèle muté soit dominant. On parle dans ce cas de maladie autosomale dominante. La présence d’un allèle dominant suffit à provoquer la maladie. Celles-ci sont plus rares mais aussi souvent plus graves. On peut citer la chorée de Huntington, une maladie neurodégénérative ; la sclérose tubéreuse provoquant la formation de nombreuses tumeurs bénignes dans l’organisme ; l’hypercholestérolémie dite familiale ; ou l’achondroplastie, qui est la cause la plus commune du nanisme.

Et qu’aurait dit Gregor Mendel ?

Gregor MendelVous connaissez forcément son nom… C’est lui qui s’amusait il y a 150 ans avec des petits pois lisses et ridés ! 

Mais à force de s’amuser, Mendel a pu établir les lois de la génétique moderne, ces mêmes lois qu’on utilise encore aujourd’hui pour comprendre comment un caractère dominant ou récessif peut être transmis d’une génération à la suivante. 

Mendel a établi un « code » visuel permettant de dessiner facilement des arbres génétiques : un rond pour une femme, un carré pour un homme, un triangle pour un sexe indéterminé. Blanc pour un phénotype dominant homozygote, noir pour un phénotype récessif homozygote, gros ou à moitié coloré pour un phénotype dominant hétérozygote (ou porteur sain). Voici les différents cas de figure qu’on peut observer dans le cas d’une transmission autosomale récessive. 

transmission autosomale récessive

Plus en détail : d’où provient le ratio ¼,¼,½ ?

Reprenons un exemple parmi les six présentés précédemment, pour mieux comprendre d’où viennent ces rapports de transmission. 

Chaque parent porte lui-même deux allèles pour chaque gène. Au cours du processus de méiose, qui permet de former les gamètes, ou cellules reproductrices, ce matériel génétique est séparé. Ainsi, chaque gamète ne possédera non pas les deux copies de chaque chromosome, mais une seule. 

À partir de là, tout n’est plus qu’une histoire de statistique… 

Arbre statistique

L'hémoglobine en détails

Avant de présenter un exemple de maladie génétique, parlons un peu de l’hémoglobine… L’hémoglobine est une protéine responsable du transport dans l’oxygène dans le sang. On la retrouve essentiellement dans les globules rouges ou hématies, à raison de 125 à 175 grammes d’hémoglobine par litre de sang chez l'Homme. 

Les premières observations d’hémoglobine remontent à 1840. À cette époque, Friedrich Ludwig Hünefeld, un médecin allemand, écrit : « J’ai pu observer dans pratiquement tous les échantillons de sang séché, placé entre deux lames de verre dans un dessiccateur, des structures cristallines rectangulaires, qui, sous le microscope, avaient des bords nets et étaient rouges vifs ». 

En 1851, Otto Funke, un physiologiste allemand, décrit la croissance de cristaux d’hémoglobine, obtenus par évaporation du solvant (eau, éthanol ou éther) dans lequel il avait dilué des globules rouges. Puis, quelques années plus tard, Felix Hoppe-Seyler, chef du département de biochimie de l’Université Impériale de Strasbourg, utilisa ces travaux pour mettre en évidence la présence d’atomes de fer dans l’hémoglobine, et sa fonction de liaison de l’oxygène. 

À la même période, durant les années 1850, Claude Bernard, médecin français, démontre que l’hémoglobine est responsable de la liaison et du transport de l’oxygène, qu’il fixe par liaison chimique (de coordination), alors que tout le monde pensait que l’oxygène était sous forme dissoute dans le sang.  

Il faudra attendre 1959 pour que Max Perutz détermine la structure moléculaire de l’hémoglobine, par cristallographie aux rayons-X. Il reçut le prix Nobel de chimie pour cette découverte en 1962.

L’hémoglobine est une protéine composée de quatre sous-unités appelées globines. Chaque globine est un polypeptide, composé d’environ 150 acides aminés.  

Il existe différentes globines : la globine α, β, γ, δ, ε, et η, codées par des gènes distincts. Toutes ces globines partagent cependant une très grande « identité », c’est- à-dire qu’elles sont fortement similaires en terme de séquence et de structure.

Chromosomes 16 et 11

L’ensemble de ces gènes est le fruit de l’évolution, à partir d’un gène « ancestral » de la globine existant chez les invertébrés, qui s’est dupliqué plusieurs fois. Chaque duplication a ensuite évolué séparément des autres, de sorte qu’aujourd’hui, tous ces gènes sont très semblables mais pas identiques à 100 %.  

En fonction du stade de développement, l’hémoglobine humaine est composée de l’une ou l’autre de ces globines. Ainsi, chez l’embryon, on trouvera essentiellement les globines α et ε ; chez le fœtus, les globines α et γ  ; et chez l’adulte, les globines α, β et en moindre mesure, δ.  

Le gène de la globine η est qualifié de pseudo-gène : c’est un gène qui a « mal évolué », et qui ne code plus pour une protéine fonctionnelle. Les pseudo-gènes sont très courants. On estime en effet qu’ils sont au moins aussi nombreux que les gènes encore en activité. À ce titre, on peut les qualifier de vestiges ou de gènes-fossiles. 

Chez l’homme, l’hémoglobine normale, notée HbA, est composée de deux globines α et deux globines β. Elle représente 97 à 98% de l’hémoglobine totale. Les 2 à 3% restants sont représentés par l’hémoglobine HbA2 : elle se compose de deux globines α et deux globines δ. 

La liaison entre ces quatre chaînes de globines est assurée par des liaisons de faible énergie, non covalentes : liaisons hydrogènes, liaisons électrostatiques ou ioniques, interactions hydrophobes, etc… 

Structure 3D de l'hémoglobine

Chaque globine est capable de fixer une molécule de dioxygène, soit deux atomes d’oxygène. Ce dioxygène n’est en revanche pas lié à la globine directement, mais à une molécule associée : l’hème

L’hème n’est pas une protéine, mais une molécule dérivée d’une porphyrine.

Représentation molécule de l'hème

L’hème comporte en son centre un atome de fer ferreux Fe2+, capable de faire six liaisons. Quatre liaisons sont en place avec le noyau porphyrine ; les deux autres serviront à lier l’hème à la globine (via un acide aminé histidine) ainsi qu’à fixer le dioxygène.

Schéma 3D de l'hème

C’est cet atome de fer qui donne à l’hémoglobine sa couleur rouge. Outre fixer du dioxygène, il est également capable de fixer une autre petite molécule : le monoxyde de carbone (CO), avec une affinité 250 fois plus élevée que pour le dioxygène. C’est ce qui explique la haute toxicité du monoxyde de carbone…  

Un exemple de maladie génétique : la drépanocytose

La drépanocytose est une maladie génétique qui se traduit par une altération de l’hémoglobine, conduisant à une forme anormale des globules rouges. Ceux-ci sont falciformes (en forme de faucille). Ce type d’hémoglobine mutée (appelée hémoglobine S ou HbS) n’a pas perdu sa capacité à fixer le dioxygène. Elle est donc capable de remplir sa fonction physiologique normalement.  

En revanche, la protéine HbS se polymérise. Ceci signifie que plusieurs hémoglobines se lient les unes à la suite des autres pour former de longues chaines plus ou moins rigides, expliquant la déformation des globules rouges.   

Les conséquences peuvent être plus ou moins graves puisque les globules rouges anormaux sont très rapidement éliminés par l’organisme, résultant en une baisse parfois sévère du nombre d’hématies et donc de la capacité respiratoire des patients. Cette élimination de globules rouges, et donc d’hémoglobine, s’accompagne d’une production de « déchets » que l’organisme doit ensuite éliminer. L’un de ces déchets est la bilirubine, une molécule de couleur jaune résultant du recyclage de l’hème. Lorsque la bilirubine est en trop grand quantité dans l’organisme, celui-ci peine à l’éliminer correctement et le patient développe un ictère, c’est-à-dire une coloration jaune de la peau et des muqueuses, notamment les yeux.   

Enfin, la rigidité des globules rouges tend à obstruer les petits vaisseaux sanguins, provoquant des douleurs notamment aux extrémités (pieds, mains). 

La drépanocytose touche actuellement 120 millions de personnes dans le monde, avec 300.000 nouveaux cas chaque année. En France, le développement de tests permettant de dépister les porteurs sains de la maladie, et donc les personnes susceptibles de la transmettre, a permis de faire baisser le nombre de nouveaux cas à 300 par an.

C’est en 1949 que des chercheurs ont montré que cette maladie était mendélienne, c’est-à-dire à transmission génétique. La même année, la structure de l’hémoglobine chez des patients atteints de la maladie a pu être comparée à celle de patients sains : cette structure était différente, anormale. C’est la première fois qu’on découvrait l’origine moléculaire d’une maladie génétique. 

En 1956, un autre chercheur a montré que l’hémoglobine de patients drépanocytaires, et plus précisément la globine β, présentait une mutation, entraînant le remplacement d’un acide aminé par un autre, et conférant ainsi d’autres propriétés chimiques à la protéine.  

Voici la séquence nucléotidique du gène de la globine β, normal (on dit aussi sauvage) en haut et muté dans le cas d’un patient drépanocytaire en dessous :

séquence nucléotidique du gène de la globine β, normal et muté

Et les séquences en acides aminés de la protéine une fois traduite par le ribosome :

Séquences en acides aminés de la protéine traduite par le  ribosome

Cette mutation au sein de l’hémoglobine lui confère des propriétés physico-chimiques différentes. En effet, l’acide aminé «acide glutamique » (E) est remplacé par un acide aminé « valine » (V), n’ayant pas les mêmes propriétés.  

  • Mutations dans l'hémoglobine
  • Structures de HbA et HbS

En observant les structures ci-dessus à gauche, on n’observe pas une si grande différence. Et pourtant, ce simple changement d’acide aminé amène l’hémoglobine à se polymériser, c’est-à-dire à s’assembler en longues chaînes.

Vous voulez en savoir plus ?

Découvrez nos rubriques :